Giulia Larigaldie

« Aujourd’hui, maman est morte. »

✅ C’est avec cette phrase que commence « L’étranger » d’Albert Camus.

???? Depuis 1946, les traducteurs se sont arraché les cheveux et déchirés sur sa traduction en anglais : « Mother died today », « Maman died today », « My mother died today », “Mama died today” ou “Today, Maman died” ?

? Ou de l’art délicat de la traduction…

? Traduire une œuvre, ce n’est pas seulement transposer des phrases dans une autre langue. Il s’agit de comprendre l’auteur, son univers, son intention. Il est primordial d’identifier le rythme de son texte, sa musicalité, ses petites imperfections ou manies qui le rendent singulier. Puis il convient de retranscrire cela de façon esthétique et propre au langage de traduction, comme le ferait un écrivain. Tout en restant en retrait, tout en s’effaçant derrière l’auteur que l’on traduit. ??‍♂️

❓ Est-il art plus difficile ?

? Lorsque je lis les premières lignes de « La mer » de John Banville, traduit par Michèle Albaret-Maatsch (qui est également la traductrice de Margaret Atwood), je ne puis qu’être extrêmement impressionnée par tant de talent ! ?? C’est de la haute joaillerie !

« Ils partirent, les dieux, le jour de la drôle de marée. Toute la matinée, sous un ciel laiteux, les eaux avaient monté, monté, jusqu’à atteindre un niveau sans précédent, et les petites vagues s’étaient aventurées sur un sable assoiffé que rien n’avait mouillé depuis des années, sinon la pluie, pour venir lécher le pied même des dunes. »

« Quelqu’un vient de me faire tourner les sangs. Quelqu’un. »

« Il y a toujours, sur la gauche, un boqueteau de conifères – les mêmes, effilées, marron foncé comme une robe de singe, ils répandent une désagréable odeur de goudron et leurs troncs se déploient en un fouillis cauchemardesque –, qu’une pelouse mal entretenue sépare de la grande fenêtre en saillie de l’ancienne salle de séjour, que Mlle Vavasour préfère appeler aujourd’hui, dans son sabir de propriétaire, le salon.